mercredi 31 janvier 2007

Faut-il croire Internet ?

David Monniaux, membre du conseil d’administration de l’association Wikimédia France.

« Wikipédia n’est pas un site de libre expression, Wikipédia ne prend pas parti »

Souvent accusé de diffuser des informations erronées ou incomplètes, l’encyclopédie en ligne Wikipédia n’en est pas moins un des fleurons de cet Internet qui donne la parole à l’internaute, l’Internet «génération 2.0 ». David Monniaux et l’association pour laquelle il travaille, Wikimédia, défendent le développement de projets contenant du savoir libre, visant à en distribuer le contenu publiquement et gratuitement. Il fustige ceux qui disent que cette entreprise se fait au prix d’une information de qualité.

Brice Le Roy : Faut-il croire les informations qui circulent sur la toile ?

David Monniaux : C’est une question qui demande une réponse nuancée. Pour toute information, quelle qu’elle soit, il faut s’interroger sur les auteurs, les motivations… il faut la recouper avec d’autres sources. Cela dépend également du sujet. Prenons un exemple : la presse généraliste raconte souvent des fadaises en matière d’actualité scientifique. Il faut alors s’orienter vers des revues spécialisées. Effectivement, Internet a tendance à favoriser le développement de rumeurs. Internet n’est cependant pas le seul fautif. Pensons à David Pujadas qui avait annoncé sur France 2 le retrait d’Alain Juppé de la vie politique. Plus récemment, il y a eu l’affaire de la SCI [Société Civile Immobilière NDLR] du couple Hollande-Royal : il semblerait que cette rumeur soit née sur Internet, téléguidée par des motivations politiques. La presse s’est alors engouffrée.

BLR : Pour autant, la presse n’est-elle pas à juste titre un média plus sûr ?

DM : Encore une fois, Internet est un média sûr, mais il s’agit de distinguer blogs et sites d’information. Wikipédia n’est pas un site de libre expression, contrairement à un blog. C’est un site où l’on rapporte des opinions, disposant de sources identifiables ayant une certaine réputation. En théorie, on ne retrouve pas de rumeurs sur Wikipédia.

BLR : Comment vérifiez-vous le contenu de l’encyclopédie ?

DM : Il faut savoir que Wikipédia est un hébergeur. Nous n’avons pas de conseil de direction, ni un quelconque organe qui se réunit pour censurer l’expression. Par contre, il existe des règles de fonctionnement. Si un internaute rajoute des informations non sourcées et discutables, tout utilisateur peut demander à ce que ces informations soient enlevées. Il y a néanmoins des sujets controversés, qu’ils ressortissent aux religions, ou tout simplement à des sujets où l’on ne peut prétendre à une vérité définitive : l’économie est un de ces sujets. Ces controverses ne sont pas le lot de l’encyclopédie en ligne uniquement, elles se retrouvent dans tout organe d’information.

BLR : Wikipédia serait donc irréprochable…

DM : En théorie, les articles sur Wikipédia doivent avoir une neutralité de point de vue. Ils doivent représenter les avis ayant pignon sur rue. Wikipédia ne prend pas parti. Je ne dis pas que tous les internautes ont intégré ce concept. Notre objectivité, c’est de présenter les principaux avis et de laisser le lecteur faire sa synthèse. Après, il y a bien sûr des écarts. Un aveu : les biographies d’hommes publics vivants disponibles sur notre site sont peu objectives, du simple fait qu’il n’y a pas de sources qui fasse autorité. Ainsi, il est arrivé que des politiciens chargent leurs secrétaires de retoucher leur page s’il était trop fait mention de promesses électorales non tenues. En définitive, c’est au lecteur d’adopter une démarche active, et ce envers toute source. Wikipédia et l’Internet en général ne dérogent pas à cette règle.
© Brice 2007

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